“Elle l'embrassait , et puis , après l'avoir lâché , le regardait et le reprenais pour l'embrasser encore une fois , comme si , ayant mesuré en elle-même tout l'amour qu'elle pouvait lui porter ou lui exprimer, elle avait décidé qu'une mesure manquait encore .”
“Elle le regardait d'un curieux air indécis, comme si elle était partagée entre la foi qu'elle avait dans l’intelligence de son fils et sa certitude que la vie toute entière était faite d'un malheur contre lequel on ne pouvait rien qu'on pouvait seulement endurer .”
“Mary Lou et moi, on est amies depuis qu’on est toutes petites. J’étais le boute-en-train de service, et elle, le cancre de la classe. « Cancre » n’est peut-être pas le mot juste. Disons que ses objectifs n’étaient pas très hauts. Elle voulait se marier et fonder une famille. Et si elle pouvait épouser le capitaine d’une équipe de foot, c’était encore mieux. [...]Moi, à la même époque, je rêvais d’épouser Aladin pour qu’il m’emmène sur son tapis volant. Donc, vous voyez : on n’avait pas les mêmes valeurs.”
“VoisineJe peux rester des après-midi entiers à regarder cette fille, caché derrière mon rideau. Je me demande ce qu'elle peut écrire sur son ordinateur. A quoi elle pense quand elle regarde par la fenêtre. Je me demande ce qu'elle mange, ce qu'elle utilise comme dentifrice, ce qu'elle écoute comme musique. Un jour, je l'ai vue danser toute seule. Je me demande si elle a des frères et sœurs, si elle met la radio quand elle se lève le matin, si elle préfère l'Espagne ou l'Italie, si elle garde son mouchoir en boule dans sa main quand elle pleure et si elle aime Thomas Bernhard. Je me demande comment elle dort et comment elle jouit. Je me demande comment est son corps de près. Je me demande si elle s'épile ou si au contraire elle a une grosse toison. Je me demande si elle lit des livres en anglais. Je me demande ce qui la fait rire, ce qui la met hors d'elle, ce qui la touche et si elle a du goût. Qu'est-ce qu'elle peut bien en penser, cette fille, de la hausse du baril de pétrole et des Farc, et que dans trente ans il n'y aura sans doute plus de gorilles dans les montagnes du Rwanda ? Je me demande à quoi elle pense quand je la vois fumer sur son canapé, et ce qu'elle fume comme cigarettes. Est-ce que ça lui pèse d'être seule ? Est-ce qu'elle a un homme dans sa vie ? Et si c'est le cas, pourquoi c'est elle qui va toujours chez lui ? Pourquoi il n'y a jamais d'homme chez elle ? Je me demande comment elle se voit dans vingt ans. Je me demande quel sens elle donne à sa vie. Qu'est-ce qu'elle pense de sa vie quand elle est comme ça, toute seule, chez elle ? Si ça se trouve, elle n'a aucun intérêt, cette fille.”
“La verité est triste, comme vous le savez. Elle déçoit parce qu'elle restreint. Elle tient dans un poing fermé, puis dans le geste d'une main qui se délace et rejette. Elle est pauvre, elle démeuble et démunit.”
“Elle le regarda enfourcher son vélo et filer vers le carrefour. Elle pensa mon Dieu il faut que je le rappelle. Vite. Puis elle pensa s'il croit que je vais le supplier! Puis oh mon Dieu si ça se trouve c'est la dernière fois que je le vois! - Salut, murmura-t-elle. Le vélo avait disparu depuis une bonne minute.”