“Jusqu'à présent, lecteur, suivant l'antique usage,Je te disais bonjour à la première page.Mon livre, cette fois, se ferme moins gaiement ;En vérité, ce siècle est un mauvais moment.Tout s'en va, les plaisirs et les moeurs d'un autre âge,Les rois, les dieux vaincus, le hasard triomphant,Rosafinde et Suzon qui me trouvent trop sage,Lamartine vieilli qui me traite en enfant.La politique, hélas ! voilà notre misère.Mes meilleurs ennemis me conseillent d'en faire.Être rouge ce soir, blanc demain, ma foi, non.Je veux, quand on m'a lu, qu'on puisse me relire.Si deux noms, par hasard, s'embrouillent sur ma lyre,Ce ne sera jamais que Ninette ou Ninon.”

Alfred De Musset

Alfred De Musset - “Jusqu'à présent, lecteur, suivant...” 1

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“Femelle, je te traiterai en femelle, et c'est bassement que je te séduirai, comme tu le mérites et comme tu le veux. A notre prochaine rencontre, et ce sera bientôt, en deux heures je te séduirai par les moyens qui leur plaisent à toutes, les sales, sales moyens, et tu tomberas en grand imbécile amour, et ainsi vengerai-je les vieux et les laids, et tous les naïfs qui ne savent pas vous séduire, et tu partiras avec moi, extasiée et les yeux frits !”

Albert Cohen
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“Mais à cette heure, où suis-je ? Et comment séparer ce café désert de cette chambre du passé. Je ne sais plus si je vis ou si je me souviens. Les lumières des phares sont là. Et l’Arabe qui se dresse devant moi me dit qu’il va fermer. Il faut sortir. Je ne veux plus descendre cette pente si dangereuse. Il est vrai que je regarde une dernière fois la baie et ses lumières, que ce qui monte alors vers moi n’est pas l’espoir de jours meilleurs, mais une indifférence sereine et primitive à tout et à moi-même. Mais il faut briser cette courbe trop molle et trop facile. Et j’ai besoin de ma lucidité. Oui, tout est simple. Ce sont les hommes qui compliquent les choses. Qu’on ne nous raconte pas d’histoires. Qu’on ne nous dise pas du condamné à mort : « Il va payer sa dette à la société », mais : « On va lui couper le cou. » Ça n’a l’air de rien. Mais ça fait une petite différence. Et puis, il y a des gens qui préfèrent regarder leur destin dans les yeux.”

Albert Camus
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“Comprendre... Vous n'avez que ce mot-là à la bouche, tous, depuis que je suis toute petite. Il fallait comprendre qu'on ne peut pas toucher à l'eau, à la belle eau fuyante et froide parce que cela mouille les dalles, à la terre parce que cela tache les robes. Il fallait comprendre qu'on ne doit pas manger tout à la fois, donner tout ce qu'on a dans ses poches au mendiant qu'on rencontre, courir, courir dans le vent jusqu'à ce qu'on tombe par terre et boire quand on a chaud et se baigner quand il est trop tôt ou trop tard, mais pas juste quand on en a envie ! Comprendre. Toujours comprendre. Moi, je ne veux pas comprendre. Je comprendrai quand je serai vieille [...]. Si je deviens vieille. Pas maintenant.”

Jean Anouilh
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“Don Juan : [...] Les voilà, mes spectres, les spectres de ce que je ne suis pas. Ce sont eux qui me persécutent et m'écoeurent, et qui me survivront. Ils vivront, car il sont le mensonge. Mais si je dois payer ma vie au prix de toutes les sottises et de tous les mensonges qu'on aura dits sur moi, peut-être vaudrait-il mieux n'avoir pas vécu. Je vais changer d'habit et mettre mon beau costume. Il faut être bien vêtu quand on va être arrêté.”

Henry de Montherlant
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“Quant à moi, maintenant, j'ai fermé mon âme. Je ne dis plus à personne ce que je crois, ce que je pense et ce que j'aime. Me sachant condamné à l'horrible solitude, je regarde les choses, sans jamais émettre mon avis. Que m'importent les opinions, les querelles, les plaisirs, les croyances ! Ne pouvant rien partager avec personne, je me suis désintéressé de tout. Ma pensée, invisible, demeure inexplorée. J'ai des phrases banales pour répondre aux interrogations de chaque jour, et un sourire qui dit "oui", quand je ne veux même pas prendre la peine de parler.”

Guy de Maupassant
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