“Je suis un être de dialogue ; tout en moi combat et se contredit. Les Mémoires ne sont jamais qu'à demi sincères, si grand que soit le souci de vérité : tout est toujours plus compliqué qu'on ne le dit. Peut-être même approche-t-on de plus près la vérité dans le roman.”
“Car, je te le dis en vérité, Nathanaël, chaque désir m'a plus enrichi que la possession toujours fausse de l'objet même de mon désir.”
“C'est souvent lorsqu'elle est le plus désagréable à entendre qu'une vérité est le plus utile à dire, et lorsqu'elle risque de rencontrer l'opposition la plus vive. Mais il y a souvent péril à ne point souffler dans le sens du vent.”
“Terre en vacance d'oeuvres d'art. Je méprise ceux qui ne savent reconnaître la beauté que transcrite déjà et toute interprétée. Le peuple arabe a ceci d'admirable que, son art, il le vit, il le chante et le dissipe au jour le jour; il ne le fixe point et ne l'embaume en aucune oeuvre. C'est la cause et l'effet de l'absence de grands artistes. J'ai toujours cru les grands artistes ceux qui osent donner droit de beauté à des choses si naturelles qu'elles font dire après à qui les voit : 'Comment n'avais-je pas compris jusqu'alors que cela était aussi beau?...”
“Le style des Faux-Monnayeurs ne doit présenter aucun intérêt de surface, aucune saillie. Tout doit être dit de la manière la plus plate, celle qui fera dire à certains jongleurs : que trouvez-vous à admirer là-dedans ?”
“Moi qui d'abord ne trouvais de goût qu'au passé, la subite saveur de l'instant m'a pu griser un jour, pensai-je, mais le futur désenchante l'heure présente, plus encore que le présent ne désenchanta le passé...”
“Jette mon livre; dis-toi bien que ce n'est là qu'une des mille postures possibles en face de la vie. Cherche la tienne. Ce qu'un autre aurait aussi bien fait que toi, ne le fais pas. Ce qu'un autre aurait aussi bien dit que toi, ne le dis pas, -- aussi bien écrit que toi, ne l'écris pas. Ne t'attache en toi qu'à ce que tu sens qui n'est nulle part ailleurs qu'en toi-même, et crée de toi, impatiemment ou patiemment, ah! le plus irremplaçable des êtres.”