“Un peu comme lorsque je rentre d'un voyage quelque part et que tout le monde me demande comment c'était : peu à peu mes différentes réponses n'en font plus qu'une, mes impressions se resserrent sur elles-mêmes, ouais, c'est cool, là-bas, et tiens, une anecdote marrante... puis ce discours unique se substitue à la réalité du souvenir.Du coup, j'ai franchement eu peur. J'ai ressenti cette crainte familière, soudainement intense et sincère, qu'une fois toute sensation échappée de ma vie, il ne reste plus de celle-ci qu'un cliché. Et le jour de ma mort, saint Pierre me demanderait :- C'était comment ?- Vraiment super, en bas. J'aimais bien la bouffe. m'enfin, avec la tourista... Bon, les gens sont tous très sympas quand même.Et ça serait tout. (...)Et j'ai décidé de raconter quelque chose de nouveau sur mon séjour à chaque personne qui voudrait que je lui en parle, sans me répéter une seule fois.”
“J'ai perdu ma force et ma vie,Et mes amis et ma gaieté;J'ai perdu jusqu'à la fiertéQui faisait croire à mon génie.Quand j'ai connu la Vérité,J'ai cru que c'était une amie ;Quand je l'ai comprise et sentie,J'en étais déjà dégoûté.Et pourtant elle est éternelle,Et ceux qui se sont passés d'elleIci-bas ont tout ignoré.Dieu parle, il faut qu'on lui réponde.Le seul bien qui me reste au mondeEst d'avoir quelquefois pleuré.”
“- Quand j'aurai trouvé une réponse pour Roy, j'aurai l'esprit plus clair, plus libéré. Tant que je n'aurai pas de certitude à son sujet, j'aurai des doutes sur moi. Et quand on doute de soi-même, on doute de tout, tu le sais...Assise loin de moi, elle approuve de la tête, mais je vois ses yeux s'emplir de larmes. Je ressens tout à coup une véritable bouffée d'émotion pour elle, très intense. Je me lève et vais la prendre dans mes bras. Elle pleure doucement sur mon épaule. Je crois bien avoir pleuré. Un peu. Nous faisons l'amour. Pour la première fois depuis des mois, je me rends jusqu'au bout. Mais il y a quelque chose de désespéré dans cette communication, comme si nous le faisions pour la dernière fois.”
“J'ai regardé à ma montre, et j'ai calculé combien de temps il me restait à vivre ; j'ai vu que j'avais encore une heure à peine. Il me reste assez de papier sur ma table pour retracer à la hête tous les souvenirs de ma vie et toutes les circonstances qui ont influé sur cet enchaînement stupide et logique de jours et de nuits , de larmes et de rires, qu'on a coutume d'appeler l'existence d'un homme.”
“Le plus curieux, c'est que, peu à peu, un autre sentiment a fait surface. Quelque chose comme de la déception. Et je me suis aperçue que, en dépit de tout, j'aurais vraiment aimé aller voir le grand canyon.”
“Est-ce que j'ai seulement envie de quelque chose? J'ai tout. Chaque matin j'ouvre les yeux et je me découvre milliardaire: la vie est là, discrète, bruyante, colorée, petite, immense.[...]Vraiment, j'ai tout. Pourquoi aurais-je envie de quelques chose de plus? Y a-t-il quelque chose de plus que tout?[...]Je ne comprends rien à ce monde. J'adore regarder ce monde auquel je ne comprends rien. Le regarder et l'écouter.[...]Voir, entendre, aimer. La vie est un cadeau dont je défais les ficelles chaque matin, au réveil. La vie est un trésor dont je découvre le plus beau chaque soir, avant de fermer les paupières: Geai assise au pied du lit, souriante.”