“Le monde entier est dans ce que nous disons - et tout entier éclairé par ce que nous taisons. (p. 34)”
“Ah! je voulais te dire aussi, n'aie pas peur de leur sabir. Le sabir du pauvre d'aujourd'hui, c'est l'argot du pauvre d'hier, ni plus ni moins. Depuis toujours le pauvre parle argot. Sais-tu pourquoi? Pour faire croire au riche qu'il a quelque chose à lui cacher. Il n'a rien à cacher, bien sûr, il est beaucoup trop pauvre, rien que des petits trafics par-ci par-là, des broutilles, mais il tient à faire croire que c'est un monde entier qu'il cache, un univers qui nous serait interdit, et si vaste qu'il aurait besoin de toute une langue pour l'exprimer. Mais il n'y a pas de monde, bien sûr, et pas de langue. Rien qu'un petit lexique de connivence, histoire de se tenir chaud, de camoufler le désespoir.”
“Que des livres puissent à ce point bouleverser notre conscience et laisser le monde aller au pire, voilà de quoi rester muet.”
“... tu sais le pauvre parle fort, c'est une de ses caractéristiques, un invariant historique et géographique, il parle fort depuis toujours et dans le monde entier, il parle d'autant plus fort qu'il est entouré de pauvres, le pauvre, et qui parlent fort eux aussi, pour se faire entendre, comprends-tu? Le pauvre a la cloison mince. Et il jure beaucoup, c'est vrai, mais sans penser à mal, rassure-toi...”
“quel guillochis oeuvre par la providence que la vie de l'homme! par combien de voies secretes et contraires les circonstances diverses ne precipitent-elles pas nos affections! aujourd'hui nous aimons ce que demain nous hairons,aujourd'hui nous recherchons ce que nous fuirons demain,aujourd'hui nous desirons ce que demain nous fera peur...”
“Aimer c’est, finalement, faire don de nos préférences à ceux que nous préférons. Et ces partages peuplent l’invisible citadelle de notre liberté. Nous sommes habités de livres et d’amis.”
“Il y a donc de "bons" et de "mauvais" romans.Le plus souvent, ce sont les seconds que nous trouvons d'abord sur notre route.Et ma foi, quand ce fut mon tour d'y passer, j'ai le souvenir d'avoir trouvé ça "vachement bien". J'ai eu beaucoup de chance : on ne s'est pas moqué de moi, on n'a pas levé les yeux au ciel, on ne m'a pas traité de crétin. On a juste laissé traîner sur mon passage quelques "bons" romans en se gardant bien de m'interdire les autres.C'était la sagesse. (p. 182)”