“Le créateur, ou l´artiste, ne se contente pas de produire un objet utile, mais il investit cet objet de sa subjectivité, de son ressenti personnel: il va incarner dans son oeuvre son 'idea', c´est-à-dire le projet, la vision qu´il porte en lui et dans laquelle d´autres vont se retrouver, car la création artistique, acte gratuit, sans "utilité" réelle, est une activité symbolique qui s´adresse au plus profond de l´être. D´ailleurs, pour la qualifier, nous utilisons le language du coeur et de l´âme: face à une oeuvre d´art nous nous déclarons "émus", "touchés", "bouleversés". Ce n´est pas l´usage que nous pouvons en faire qui nous interpelle mais sa dimension esthétique et symbolique gratuite.”
“Nous étions perchés sur le toit de l´Amérique, et ne savions que gueuler - pour atteindre, qui sait ? l´autre cóté de la nuit, l´Est, au-delá des plaines, ou un vieillard chenu était peut-ětre en route vers nous, porteur de la Parole, sur le point d´arriver pour nous faire taire.”
“le moi est avant tout une instance de maitrise. C est un système de défense au service du principe de plaisir contre le dehors, mais aussi contre ces pulsions intimes et étrangères a la fois qui nous habitent.Ce sont ces remparts qu il s agit d abattre, ce barrage contre le pacifique qu il faut ruiner.Disons-le autrement, le moi est une organisation pour résister a la passivité essentielle du sujet a l égard de l autre. Le moi est foncièrement résistance a Dieu.”
“Ce n'est pas vrai du tout, que l'être humain soit une créature qui comprenne la vie. Son intelligence ne lui sert pas à grand'chose; par le fait qu'il parle, il n'en est pas moins bête. Mais là où sa bêtise dépasse celle des animaux, c'est quand il s'agit de deviner et de sentir la détresse de son sembable.Il nous arrive, parfois, de voir dans la rue un homme à la face blême et au regard perdu, ou bien une femme en pleurs. Si nous étions des êtres supérieurs, nous devrions arrêter cet homme ou cette femme, et leur offrir promptement notre assistance. C'est là toute la supériorité que j'attribuerais à l'être humain sur la bête. Il n'en est rien.”
“[...] la foi, l'acte de croire à des mythes, des idéologies ou des légendes surnaturels, est la conséquence de la biologie. [...] Il est dans notre nature de survivre. La foi est une réponse instinctive à des aspects de l'existence que nous ne pouvons expliquer autrement, que ce soit le vide moral que nous percevons dans l'univers, la certitude de la mort, le mystère des origines, le sens de notre propre vie ou son absence de sens. Ce sont des aspects élémentaires et d'une extraordinaire simplicité, mais nos propres limitations nous empêchent de donner des réponses sans équivoque à ces questions et, pour cette raison, nous générons pour nous défendre une réponse émotionnelle. C'est de la pure et simple biologie. [...] Toute interprétation ou observation de la réalité l'est par nécessité. En l’occurrence, le problème réside dans le fait que l'homme est un animal moral abandonné dans un monde amoral, condamné à une existence finie et sans autre signification que de perpétuer le cycle naturel de l'espèce. Il est impossible de survivre dans un état prolongé de réalité, au moins pour un être humain.”
“Celui qui éprouve de l'aversion pour les danseurs et veut les dénigrer se heurtera toujours à un obstacle infranchissable : leur honnêteté ; car en s'exposant constamment au public, le danseur se condamne à être irréprochable ; il n'a pas conclu comme Faust un contrat avec le Diable, il l'a conclu avec l'Ange : il veut faire de sa vie une oeuvre d'art et c'est dans ce travail que l'Ange l'aide ; car, n'oublie pas, la danse est un art ! C'est dans cette obsession de voir en sa propre vie la matière d'une oeuvre d'art que se trouve la vraie essence du danseur ; il ne prêche pas la morale, il la danse ! Il veut émouvoir et éblouir le monde par la beauté de sa vie ! il est amoureux de sa vie comme un sculpteur peut être amoureux de la statue qu'il est en train de modeler." (chapitre 6)”