“cela fait si longtemps que ça dure que j'ai cessé de me demander si c'est dans la haine ou dans l'amour que nous trouvons la force de continuer cette vie mensongère, que nous puisons l'énergie formidable qui nous permet encore de souffrir, et d'espérer.”

Georges Perec

Explore This Quote Further

Quote by Georges Perec: “cela fait si longtemps que ça dure que j'ai cess… - Image 1

Similar quotes

“Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s'apprend pas: la solitude, l'indifférence, la patience, le silence. Tu dois te déshabituer de tout: d'aller à la rencontre de ceux que si longtemps tu as côtoyés, de prendre tes repas, tes cafés à la place que chaque jour d'autres ont retenue pour toi, ont parfois défendue pour toi, de traîner dans la complicité fade des amitiés qui n'en finissent pas de se survivre, dans la rancoeur opportuniste et lâche des liaisons qui s'effilochent.”


“Que les poètes morts laissent la place aux autres. Et nous pourrions tout de même voir que c'est notre vénération devant ce qui a été déjà fait, si beau et si valable que ce soit, qui nous pétrifie, qui nous stabilise et nous empêche de prendre contact avec la force qui est dessous, que l'on appelle l'énergie pensante, la force vitale, le déterminisme des échanges, les menstrues de la lune ou tout ce qu'on voudra.”


“Tu n'as rien appris, sinon que la solitude n'apprend rien, que l'indifférence n'apprend rien: c'était un leurre, une illusion fascinante et piégée. Tu étais seul et voilà tout et tu voulais te protéger: qu'entre le monde et toi les ponts soient à jamais coupés. Mais tu es si peu de chose et le monde est un si grand mot: tu n'as jamais fait qu'errer dans une grande ville, que longer sur quelques kilomètres des façades, des devantures, des parcs et des quais. L'indifférence est inutile. Tu peux vouloir ou ne pas vouloir, qu'importe! Faire ou ne pas faire une partie de billard électrique, quelqu'un, de toute façon, glissera une pièce de vingt centimes dans la fente de l'appareil. Tu peux croire qu'à manger chaque jour le même repas tu accomplis un geste décisif. Mais ton refus est inutile. Ta neutralité ne veut rien dire. Ton inertie est aussi vaine que ta colère.”


“Je me demande souvent ce que je serais devenu si ma vie ne s'était pas meublée de toutes ces petites choses auxquelles je me suis attaché et de toutes celles que j'ai négligées. Je me demande souvent qui mène la danse. Si c'est ma vie qui fait de moi ce que je suis ou si c'est moi qui fait de ma vie ce qu'elle est. (p.12)”


“Il me semble qu'ils confondent but et moyen ceux qui s'effraient par trop de nos progrès techniques. Quiconque lutte dans l'unique espoir de biens matériels, en effet, ne récolte rien qui vaille de vivre. Mais la machine n'est pas un but. L'avion n'est pas un but : c'est un outil, un outil comme la charrue.Si nous croyons que la machine abîme l'homme c'est que, peut-être, nous manquons un peu de recul pour juger les effets de transformations aussi rapides que celles que nous avons subies. Que sont les cent années de l'histoire de la machine en regard des deux cent mille années de l'histoire de l'homme? C'est à peine si nous nous installons dans ce paysage de mines et de centrales électriques. C'est à peine si nous commençons d'habiter cette maison nouvelle, que nous n'avons même pas achevé de bâtir. Tout a changé si vite autour de nous : rapports humains, conditions de travail, coutumes. Notre psychologie elle-même a été bousculée dans ses bases les plus intimes. Les notions de séparation, d'absence, de distance, de retour, si les mots sont demeurés les mêmes, ne contiennent plus les mêmes réalités. Pour saisir le monde aujourd'hui, nous usons d'un langage qui fut établi pour le monde d'hier. Et la vie du passé nous semble mieux répondre à notre nature, pour la seule raison qu'elle répond mieux à notre langage.Pour le colonial qui fonde un empire, le sens de la vie est de conquérir. Le soldat méprise le colon. Mais le but de cette conquête n'était-il pas l'établissement de ce colon? Ainsi dans l'exaltation de nos progrès, nous avons fait servir les hommes à l'établissement des voies ferrées, à l'érection des usines, au forage de puits de pétrole. Nous avions un peu oublié que nous dressions ces constructions pour servir les hommes.(Terre des Hommes, ch. III)”


“Maintenant tu n'as plus de refuges. Tu as peur, tu attends que tout s'arrête, la pluie, les heures, le flot des voitures, la vie, les hommes, le monde, que tout s'écroule, les murailles, les tours, les planchers et les plafonds; que les hommes et les femmes, les vieillards et les enfants, les chiens, les chevaux, les oiseaux, un à un, tombent à terre, paralysés, pestiférés, épileptiques; que le marbre s'effrite, que le bois se pulvérise, que les maisons s'abattent en silence, que les pluies diluviennes dissolvent les peintures, disjoignent les chevilles des armoires centenaires, déchiquettent les tissus, fassent fondre l'encre des journaux; q'un feu sans flammes ronge les marches des escaliers; que les rues s'effondrent en leur exact milieu, découvrant le labyrinthe béant des égouts; que la rouille et la brume envahissent la ville.”