“Ainsi leur rencontre avait eu l'importance d'une aventure. Ils s'étaient, tout de suite, accrochés par des fibres secrètes. D'ailleurs, comment expliquer les sympathies? Pourquoi telle particularité, telle imperfection indifférente ou odieuse dans celui-ci enchante-t-elle dans celui-là? Ce qu'on appelle le coup de foudre est vrai pour toutes les passions. Avant la fin de la semaine, ils se tutoyèrent”
“L'histoire est le produit le plus dangereux que la chimie de l'intellect ait élaboré. Ses propriétés sont bien connues. Il fait rêver, il enivre les peuples, leur engendre de faux souvenirs, exagère leurs réflexes, entretient leurs vieilles plaies, les tourmente dans leur repos, les conduit au délire des grandeurs ou à celui de la persécution, et rend les nations amères, superbes, insupportables et vaines.L'histoire justifie ce que l'on veut. Elle n'enseigne rigoureusement rien, car elle contient tout, et donne des exemples de tout.”
“Quel bonheur dans ce temps-là ! quelle liberté ! quel espoir ! quellle abondance d’illusions ! Il n’en restait plus maintenant ! Elle en avait dépensé à toutes les aventures de son âme, par toutes les conditions successives, dans la virginité, dans le mariage et dans l’amour ; - les perdant ainsi continuellement le long de sa vie, comme un voyageur qui laisse quelque chose de sa richesse à toutes les auberges de la route.Mais qui donc la rendait si malheureuse ? où était la catastrophe extraordinaire qui l’avait bouleversée ? Elle releva sa tête, regardant autour d’elle, comme pour chercher la cause de ce qui la faisait souffrir.”
“—Mais, quelle que soit l'importance de l'événement, dès qu'il est écrit sur le papier, il ne fait plus qu'une ou deux lignes. "Mes yeux ne voyaient plus" ou "je n'avais plus un sou", il suffit d'une dizaine ou d'une vingtaine de lettres de l'alphabet. C'est pourquoi, quand on calligraphie des autobiographies, il arrive qu'on soit soulagé. On se dit que ce n'est pas la peine de trop réfléchir à tout ce qui se passe dans le monde.”
“Bastos, il l'a trouvé au fond d'une poubelle. Tout petit, tout miteux... Il s'est laissé attendrir. Le soir même, il a commencé à le regretter. Le petit salopard avait trouvé ses cigarettes dans la poche de sa veste et les avait dépiautées pour se rouler dedans ! L'odeur des brunes le rendait fou ! Et pas moyen de le détourner de son vice ! En tout cas, c'est comme ça que pendant des années, Raymond s'est fait faire les poches par son chat...”
“On s'empresse de les décharger de toute tâche pénible et de tout souci: c'est les délivrer du même coup de toute responsabilité. On espère qu'ainsi dupées, séduites par la facilité de leur condition, elles accepteront le rôle de mère et de ménagére dans lequel on veut les confiner.”