“Lalla attend quelque chose. Elle ne sait pas très bien quoi, mais elle attend. Les jours sont longs, à la Cité, les jours de pluie, les jours de vents, les jours de l'été. Quelquefois Lalla croit qu'elle attend seulement que les jours arrivent mais quand ils sont là, elle s'aperçoit que ce n'étaient pas eux. Elle attend, c'est tout. Les gens ont beaucoup de patience, peut-être qu'ils attendent toute leur vie quelque chose, et que jamais rien n'arrive.”
“Si vous voulez vraiment le savoir, j'aurais préféré ne jamais être né. La vie, je trouve ca bien fatigant. Bien sur, à présent la chose est faite, et je ne peux rien y changer. Mais il y a toujours au fond de moi ce regret, que je n'ariverai pas à chasser complètement, et qui gâchera tout. Maintenant, il s'agit de vieillir vite, d'avaler les années le plus vite possible, sans regarder à gauche ni à droit”
“Il y a des personnes à qui on n'ose donner d'autres marques de la passion qu'on a pour elles que par les choses qui ne les regardent point ; et, n'osant leur faire paraître qu'on les aime, on voudrait du moins qu'elles vissent que l'on ne veut être aimé de personne. L'on voudrait qu'elles sussent qu'il n'y a point de beauté, dans quelques rang qu'elle pût être, que l'on ne regardât avec indifférence, et qu'il n'y a point de couronne que l'on voulût acheter au prix de ne les voir jamais. Les femmes jugent d'ordinaire de la passion qu'on a pour elles, continua-t-il, par le soin qu'on prend de leur plaire et de les chercher ; mais ce n'est pas une chose difficile pour peu qu'elles soient aimables ; ce qui est difficile, c'est de ne s'abandonner pas au plaisir de les suivre ; c'est de les éviter, par peur de laisser paraître au public, et quasi à elles-mêmes, les sentiments que l'on a pour elles.”
“Ce n'est pas la première fois que je veux tuer des mouches avec un canon. C'est la cent millième fois. Cela m'arrive tous les jours et tout le jour. Je prévois toujours le pire et je me démène toujours comme si c'était le pire. Eh ! Prends donc l'habitude de considérer que les choses ordinaires arrivent aussi.”
“Pourquoi, s’écria-t-elle tout-à-coup, rester seule dans cette horrible solitude ? pourquoi ne pas suivre mon amant ? la guerre, les combats ne sauraient m’effrayer ; ce qui m’épouvante, ce sont les lieux où il n’est pas. Vivre ou mourir avec lui !... et peut-être pourrai-je même, aux dépens de ma vie, sauver la sienne. Attends Login, attends, ta Lise vole sur tes pas. » Déjà Lise s’élançait vers lui ; mais l’image de sa mère, de sa mère pauvre, souffrante, abandonnée, se présente à elle, et l’arrête. Elle soupire, tourne ses regards vers la cabane, et s’y traîne en silence.”
“De même que la valeur de la vie n'est pas en sa surface mais dans ses profondeurs, les choses vues ne sont pas dans leur écorce mais dans leur noyau, et les hommes ne sont pas dans leur visage mais dans leur coeur.”
“Quel bonheur dans ce temps-là ! quelle liberté ! quel espoir ! quellle abondance d’illusions ! Il n’en restait plus maintenant ! Elle en avait dépensé à toutes les aventures de son âme, par toutes les conditions successives, dans la virginité, dans le mariage et dans l’amour ; - les perdant ainsi continuellement le long de sa vie, comme un voyageur qui laisse quelque chose de sa richesse à toutes les auberges de la route.Mais qui donc la rendait si malheureuse ? où était la catastrophe extraordinaire qui l’avait bouleversée ? Elle releva sa tête, regardant autour d’elle, comme pour chercher la cause de ce qui la faisait souffrir.”