“A cet instant, il se produisit un événement comme il en arrive un ou deux dans une vie. Un coup de foudre. Il n'y a pas d'autre mot pour qualifier ce qui se passa entre eux. Ils se regardèrent longtemps.”
“Celui qui éprouve de l'aversion pour les danseurs et veut les dénigrer se heurtera toujours à un obstacle infranchissable : leur honnêteté ; car en s'exposant constamment au public, le danseur se condamne à être irréprochable ; il n'a pas conclu comme Faust un contrat avec le Diable, il l'a conclu avec l'Ange : il veut faire de sa vie une oeuvre d'art et c'est dans ce travail que l'Ange l'aide ; car, n'oublie pas, la danse est un art ! C'est dans cette obsession de voir en sa propre vie la matière d'une oeuvre d'art que se trouve la vraie essence du danseur ; il ne prêche pas la morale, il la danse ! Il veut émouvoir et éblouir le monde par la beauté de sa vie ! il est amoureux de sa vie comme un sculpteur peut être amoureux de la statue qu'il est en train de modeler." (chapitre 6)”
“Un bon livre se retrouve toujours entre les mains d'un lecteur libre. Sinon il n'y reste pas longtemps, le mauvais lecteur cherche à se débarrasser de tout ce qui ne ressemble pas à ce qu'il a déjà lu. Lire n'est pas nécessaire pour le corps (cela peut même se révéler nocif), seul l'oxygène l'est. Mais un bon livre oxygène l'esprit.”
“Rien n'est jamais acquis à l'homme Ni sa forceNi sa faiblesse ni son coeur Et quand il croitOuvrir ses bras son ombre est celle d'une croixEt quand il croit serrer son bonheur il le broieSa vie est un étrange et douloureux divorce Il n'y a pas d'amour heureuxSa vie Elle ressemble à ces soldats sans armesQu'on avait habillés pour un autre destinA quoi peut leur servir de se lever matinEux qu'on retrouve au soir désoeuvrés incertainsDites ces mots Ma vie Et retenez vos larmes Il n'y a pas d'amour heureuxMon bel amour mon cher amour ma déchirureJe te porte dans moi comme un oiseau blesséEt ceux-là sans savoir nous regardent passerRépétant après moi les mots que j'ai tressésEt qui pour tes grands yeux tout aussitôt moururent Il n'y a pas d'amour heureuxLe temps d'apprendre à vivre il est déjà trop tardQue pleurent dans la nuit nos coeurs à l'unissonCe qu'il faut de malheur pour la moindre chansonCe qu'il faut de regrets pour payer un frissonCe qu'il faut de sanglots pour un air de guitare Il n'y a pas d'amour heureuxIl n'y a pas d'amour qui ne soit à douleurIl n'y a pas d'amour dont on ne soit meurtriIl n'y a pas d'amour dont on ne soit flétriEt pas plus que de toi l'amour de la patrieIl n'y a pas d'amour qui ne vive de pleurs Il n'y a pas d'amour heureux Mais c'est notre amour à tous les deux”
“Il n'y a pas d'amour dans la liberté individuelle, dans l'indépendance, c'est tout simplement un mensonge, et l'un des plus grossiers qui puisse se concevoir; il n'y a d'amour que dans le désir d'anéantissement, de fusion, de disparition individuelle, dans une sorte comme on disait autrefois de sentiment océanique, dans quelque chose qui de toute façon était, au moins dans un futur proche, condamné.”
“Tu peux être grave et fou, qui empêche ? Tu peux être tout ce que tu veux et fou en surplus, mais il faut être fou, mon enfant. Regarde autour de toi le monde sans cesse grandissant de gens qui se prennent au sérieux. Outre qu'ils se donnent un ridicule irrémédiable devant les esprits semblables au mien, ils se font une vie dangereusement constipée. Ils sont exactement comme si, à la fois, ils se bourraient de tripes qui relâchent et de nèfles du Japon qui resserrent. Ils gonflent, gonflent, puis ils éclatent et ça sent mauvais pour tout le monde. Je n'ai pas trouvé d'image meilleure que celle-là. D'ailleurs, elle me plaît beaucoup. Il faudrait même y employer trois ou quatre mots de dialecte de façon à la rendre plus ordurière que ce qu'elle est en piémontais. Toi qui connais mon éloignement naturel pour tout ce qui est grossier, cette recherche te montre bien tout le danger que courent les gens qui se prennent au sérieux devant le jugement des esprits originaux. Ne sois jamais une mauvaise odeur pour tout un royaume, mon enfant. Promène-toi comme un jasmin au milieu de tous.”