“J'ai un problème avec la logique. Je n'ai jamais compris comment on pouvait dire une chose et son contraire. Jurer qu'on aime quelqu'un et le blesser, avoir un ami et l'oublier, se dire de la même famille et s'ignorer comme des étrangers, revendiquer des grands principes et ne pas les pratiquer, affirmer qu'on croit en Dieu et agir comme s'il n'existait pas, se prendre pour un héros quand on se comporte comme un salaud. (p.173)”
“Adieu, mon cher vieux. Relis et rebûche ton conte. Laisse-le reposer et reprends-le, les livres ne se font pas comme les enfants, mais comme les pyramides, avec un dessin prémédité, et en apportant des grands blocs l´un par-dessus l´autre, à force de reins, de temps et de sueur, et ça ne sert à rien! et ça reste dans le désert! mais en le dominant prodigieusement. Les chacals pissent au bas et les bourgeois montent dessus, etc.; continue la comparaison.”
“Finalement, le plus grand bénéfice du métier d'humoriste, et plus généralement de l'attitude humoristique, dans la vie, c'est de pouvoir se comporter comme un salaud en toute impunité, et même de pouvoir grassement rentabiliser son abjection, en succès sexuels comme en numéraire, le tout avec l'approbation générale. (La possibilité d'une île, Daniel 1,1)”
“J'ai lu quelque part que la mort était une société secrète...Ce qui n'est qu'une fin, un pis-aller, et c'est peu dire, pour la plupart des êtres, ne peut-il devenir pour d'autres une vocation? - Quelquefois, et jamais autant que ce soir, je me le suis demandé. Et - comme toutes les vocations - contagieuse.”
“Et ça jaillit comme dans un cauchemar, je dégueule des litres de vodka, des litres de champagne, mes illusions perdues, les fantômes qui me hantent, et ça gicle sur le bitume noir avec un bruit d'explosion liquide et sale qui se répercute dans ma tête comme la sentence fatale de mon indignité.”
“La vie, désormais : la gestion des déchets. Que faire de la terre et des boues contaminées, des feuilles ?Pour les déchets, on brûle comme on peut, on enterre à la sauvette. Quand on brûle, les incinérateurs rejettent dans l'air des poussières radioactives qui se reposent ailleurs, toujours un peu plus loin. On décontamine un lieu en en contaminant un autre : c'est un cercle vicieux. Ou alors, on nettoie à mains nues ou avec des gants et des masques, dans de grandes opérations citoyennes aussi spectaculaires qu'absurdes. Ce faisant, on ne fait qu'appliquer un des principes de base du nucléaire, où le problème des déchets n'est jamais résolu, il est remis à plus tard, infiniment et indéfiniment remis à plus tard. (p. 272)”