“Il n'y a pas d'amour dans la liberté individuelle, dans l'indépendance, c'est tout simplement un mensonge, et l'un des plus grossiers qui puisse se concevoir; il n'y a d'amour que dans le désir d'anéantissement, de fusion, de disparition individuelle, dans une sorte comme on disait autrefois de sentiment océanique, dans quelque chose qui de toute façon était, au moins dans un futur proche, condamné.”
“Lorsque la sexualité disparaît, c'est le corps de l'autre qui apparaît, dans sa présence vaguement hostile; ce sont les bruits, les mouvements, les odeurs; et la présence même de ce corps qu'on ne peut plus toucher, ni sanctifier par le contact, devient peu à peu une gêne; tout cela malheureusement, est connu. La disparition de la tendresse suit toujours de près celle de l'érotisme. Il n'y a pas de relation épurée, d'union supérieure des âmes, ni quoi que ce soit qui puisse y ressembler, ou même l'évoquer sur un mode allusif. Quand l'amour physique disparaît, tout disparaît; un agacement morne, sans profondeur, vient remplir la succession des jours.”
“Refuser de faire quelque chose parce qu'on l'a déjà fait, parce qu'on a déjà vécu l'expérience, conduit rapidement à une destruction, pour soi-même comme pour les autres, de toute raison de vivre comme de tout futur possible, et vous plonge dans un ennui pesant qui finit par se transformer en une amertume atroce, accompagnée de haine et de rancoeur à l'égard de ceux qui appartiennent encore à la vie.”
“Un examen un tant soit peu exhaustif de l'humanité doit nécessairement prendre en compte ce type de phénomènes. De tels êtres humains, historiquement, ont existé.Des êtres humains qui travaillaient toute leur vie, et qui travaillaient dur, uniquement par dévouement et par amour; qui donnaient littéralement leur vie aux autres dans un esprit de dévouement et d'amour; qui n'avaient cependant nullement l'impression de se sacrifier; qui n'envisageaient en réalité d'autre manière de vivre que de donner leur vie aux autres dans un esprit de dévouement et d'amour.En pratique, ces êtres humains étaient généralement des femmes.”
“Des êtres humains qui travaillaienttoute leur vie, et qui travaillaient dur, uniquement par dévouement et par amour; qui donnaient littéralementleur vie aux autres dans un esprit de dévouement et d'amour; qui n'avaient cependant nullement l'impressionde se sacrifier; qui n'envisageaient en réalité d'autre manière de vivre que de donner leur vie aux autres dansun esprit de dévouement et d'amour. En pratique, ces êtres humains étaient généralement des femmes.”
“Il y a dans la lecture quelque chose qui relève de l'irrationnel. Avant d'avoir lu, on devine tout de suite si on va aimer ou pas. On hume, on flaire le livre, on se demande si ça vaut la peine de passer du temps en sa compagnie. C'est l'alchimie invisible des signes tracés sur une feuille qui s'impriment dans notre cerveau. Un livre, c'est un être vivant.”
“Ce fut en ces circonstances, une nuit de juillet 1974, qu'Annabelle accéda à la conscience douloureuse et définitive de son existence individuelle. D'abord révélée à l'animal sous la forme de la douleur physique, l'existence individuelle n'accède dans les sociétés humaines à la pleine conscience d'elle-même que par l'intermédiaire du mensonge, avec lequel elle peut en pratique se confondre. Jusqu'à l'âge de seize ans, Annabelle n'avait pas eu de secrets pour ses parents; elle n'avait pas eu non plus - et cela avait été, elle s'en rendait compte à présent, quelque chose de rare et de précieux - desecrets pour Michel. En quelques heures cette nuit-là Annabelle prit conscience que la vie des hommes était une succession ininterrompue de mensonges. Par la même occasion, elle prit conscience de sa beauté.”