“Paul l'a écoutée, sans ciller, sans répliquer ; son beau visage détruit est demeuré impassible. A la fin, il a seulement glissé : "Je me demandais quand tu te déciderais à me faire cet aveu. Je me demandais lequel de vous deux viendrait le faire. Ce que tu m'annonces, je le sais depuis longtemps. Je le sais depuis le jour de mon retour, depuis la seconde exacte où tu as posé ton regard sur moi. C'était sur toi, l'effroi, la honte, la gêne, et puis aussi la légèreté des femmes amoureuses. C'était immanquable.”
“La douceur de l'air me fait rêver, à ce qui fut et à ce qui serait si tu étais là. Je sais que cette rêverie n'est qu'une inaptitude à vivre le présent. Je me laisse entraîner par ce courant sans regarder trop loin ou trop profondément. J'attends le moment où je retrouverai la force. Il viendra. Je sais que la vie me passionne encore. Je veux me sauver, non me délivrer de toi”
“Demain, dès l'aube, à l'heure où blanchit la campagne,Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m'attends.J'irai par la forêt, j'irai par la montagne.Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps.Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées,Sans rien voir au dehors, sans entendre aucun bruit,Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées,Triste, et le jour pour moi sera comme la nuit.Je ne regarderai ni l'or du soir qui tombe,Ni les voiles au loin descendant vers Harfleur,Et quand j'arriverai, je mettrai sur ta tombeUn bouquet de houx vert et de bruyère en fleur.”
“«Mais tu ferais mieux de t’y mettre tout de suite, ma fille. On a à peine le temps de faire un mouvement que le sablier est déjà vide, tu sais. Crois-moi, je sais de quoi je parle. Tu auras eu de la veine si tu trouves le temps d’éternuer dans ce monde incroyable.»”
“- Quand j'aurai trouvé une réponse pour Roy, j'aurai l'esprit plus clair, plus libéré. Tant que je n'aurai pas de certitude à son sujet, j'aurai des doutes sur moi. Et quand on doute de soi-même, on doute de tout, tu le sais...Assise loin de moi, elle approuve de la tête, mais je vois ses yeux s'emplir de larmes. Je ressens tout à coup une véritable bouffée d'émotion pour elle, très intense. Je me lève et vais la prendre dans mes bras. Elle pleure doucement sur mon épaule. Je crois bien avoir pleuré. Un peu. Nous faisons l'amour. Pour la première fois depuis des mois, je me rends jusqu'au bout. Mais il y a quelque chose de désespéré dans cette communication, comme si nous le faisions pour la dernière fois.”
“Mais maintenant je dirai tout, afin que tu saches qui tu quittes, de quel homme tu te sépares. Sais-tu comment d’abord je t’ai comprise ? La passion m’a saisi comme le feu, elle s’est infiltrée dans mon sang comme le poison et a troublé toutes mes pensées, tous mes sentiments. J’étais enivré. J’étais comme étourdi, et à ton amour pur, miséricordieux, j’ai répondu non d’égal à égal, non comme si j’étais digne de ton amour, mais sans comprendre ni sentir. Je ne t’ai pas comprise. Je t’ai répondu comme à la femme qui, à mon point de vue, s’oubliait jusqu’à moi et non comme à celle qui voulait m’élever jusqu’à elle.« Sais-tu de quoi je t’ai soupçonnée, ce que signifiait, s’oublier jusqu’à moi » ? Mais non, je ne t’offenserai pas par mon aveu. Je te dirai seulement que tu t’es profondément trompée sur moi ! Jamais jamais, je n’aurais pu m’élever jusqu’à toi. Je ne pouvais que te contempler dans ton amour illimité, une fois que je t’eus comprise. Mais cela n’efface pas ma faute. Ma passion rehaussée par toi n’était pas l’amour. L’amour, je ne le craignais pas. Je n’osais pas t’aimer. Dans l’amour il y a réciprocité, égalité ; et j’en étais indigne. Je ne savais pas ce qui était en moi !”